Quelle morose rentrée !
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Rarement rentrée n’aura à ce point été placée sous le signe d’une certaine désespérance ou colère pour d’autres…

Et pas seulement à cause d’une météo qui n’eut d’estivale que le nom ou des nouvelles internationales plus tragiques les unes que les autres, du Moyen-Orient à feu et à sang à l’Afrique de l’Ouest subissant une épidémie de fièvre Ebola meurtrière en passant par le conflit de plus en plus inquiétant en Ukraine ou les Etats-Unis à nouveau en proie aux tensions raciales.

Ce qui frappe en France c’est à quel point ce que beaucoup pointaient comme inévitable est en train de douloureusement se réaliser : loin d’être des solutions à la crise majeure que subissent l’Europe et le monde, les politiques d’austérité menées un peu partout suivant un néo-libéralisme aussi dogmatique que sûr de lui en sont en fait les pires accélérateurs !

On pouvait espérer un réveil en France. Certains jusqu’au sein du gouvernement commençaient enfin à le dire : tous ces sacrifices, ces coupes sombres dans les investissements, dans les subsides aux associations pourtant moribondes, dans les politiques sociales, de santé ou d’environnement n’ont aucun effet positif ni sur la croissance ni sur l’emploi au nom desquels pourtant on les a imposés. Tous ces allégements fiscaux et de charges offerts sans garanties de contreparties aux entreprises (sans distinction de secteur ou de taille) depuis deux ans, pareil : les patrons n’ont pas embauché, et la fameuse croissance est au point mort, faute de consommation des ménages et d’investissement.

Le gouvernement aurait-il donc renié ses promesses de campagne les unes après les autres, pour rien ?

Ce n’est pas faute pourtant d’avoir prévenu. Les écologistes à l’intérieur et à l’extérieur du gouvernement l’ont rapidement exprimé : en sabrant indistinctement dans les dépenses publiques, en abandonnant des pans entiers de l’investissement public pourtant créateur d’activité économique et donc d’emplois, en renonçant à toute transition écologique ambitieuse, en taillant sans pitié dans les dotations aux collectivités territoriales, principales pourvoyeuses de commande publique, notamment dans le tissu local des PME et TPE, le résultat catastrophique était hélas prévisible. On perdrait à la fois toute possibilité de reprise et la confiance des Français-es.

Quand ce sont les entreprises du BTP elles-mêmes qui expliquent qu’elles n’ont pas grand-chose à faire du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) si elles n’ont plus de commandes et doivent mettre la clé sous la porte. Quant on augmente la TVA et autres prélèvements qui touchent les plus précaires et les classes moyennes annihilant toute possibilité de reprise de la consommation des ménages pourtant principal levier de croissance. Quand des projets de logements ou de transports en commun indispensables à la vie quotidienne de millions d’habitant-e-s de notre pays (et accessoirement créateurs de dizaines de milliers d’emplois) sont retardés pour des années, voire abandonnés faute de financements (puisqu’il faut tailler dans les dépenses). Quand ce sont même les plus « sérieuses » des institutions financières de la planète qui remettent en cause l’austérité, on se dit que le gâchis est d’autant plus immense qu’il était prévisible et annoncé. Ce n’est vraiment pas la première fois que des politiques de compression de la dépense, en tuant la consommation et l’investissement, achèvent le blessé au lieu de le soigner… Comment des gouvernants qui se disent de gauche ont-ils pu à ce point croire et être leurrés par de vieilles lunes ultra-libérales inefficaces partout où elles ont été utilisées ?

Au mois d’août encore on espérait qu’il soit encore temps de revoir la donne. De renoncer aux fameux 50 milliards d’économies qui risquent d’achever notre pays en siphonnant les finances des collectivités locales et empêchant l’investissement public utile comme le logement social, les transports publics, la transition énergétique…

Eh bien non… On a viré ceux qui doutaient et mis des dociles et des financiers à leur place. Pas étonnant dans ces conditions que le choix des écologistes de ne plus faire partie d’un gouvernement de régression sociale et environnementale ait dû être confirmé fin août.

Nous sommes inquiets pour la suite, c’est peu de le dire. Mais nous continuons quoi qu’il en soit, au Parlement, sur le terrain, localement, dans les institutions où nous siégeons, à nous battre pour une France et une Europe plus juste, plus durable, plus respectueuse de la planète et des femmes et des hommes qui y vivent.

Pierre