Tribune de Vincennes – Mai 2022 : Les 50 ans du rapport du « Club de Rome »
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C’est un secret trop bien gardé, 2022 voit le 50ème anniversaire du rapport dit « du Club de Rome », écrit par Donella et Denis Meadows sur « Les limites à la croissance ». Créé quelques années plus tôt, ce club rassemble des dirigeants d’entreprise, des économistes, des scientifiques, pas tout à fait donc les hippies de l’époque, qui partagent une angoisse sourde à l’apogée de la « Grande Accélération » de l’après-guerre : une croissance infinie dans un monde fini est-elle vraiment possible ?

Idée incongrue, la question n’est pas confiée à des économistes mais à une équipe de scientifiques du bien connu Massachusetts Institute of Technology (MIT). Ainsi, la modélisation à laquelle ils s’attellent décrit les flux physiques dont dépend notre vie ici-bas, autour de 5 paramètres : la population, la production de nourriture, la production industrielle, la pollution et la consommation de ressources. Les scientifiques d’alors ne pouvaient pas s’appuyer sur les travaux du GIEC : les effets du changement climatique n’étaient pas pris en compte.

Résultat : sous la contrainte de la pollution industrielle et de l’épuisement des ressources fossiles, le niveau de vie chute fortement, quelque part au cours du 21ème siècle. Différents leviers sont introduits dans une variété de scénarii, incluant un fort progrès technologique pour une consommation moindre de ressource et une émission moindre de pollution : les lois exponentielles conduisent au même résultat, repoussé d’une ou deux décennies.

L’ouvrage fut un best-seller à sa publication, mais les économistes se montrèrent particulièrement critiques, avec en particulier un argument : si les ressources venaient à manquer, l’augmentation de leur prix permettrait de trouver des substitutions, et de nouvelles réserves. Mais trouver de nouvelles réserves d’énergie ou de matériaux fossiles demande toujours plus d’énergie et de matériaux, pour un « retour sur investissement physique » toujours plus faible. Par ailleurs, prenons l’exemple de la déforestation : quelle substitution possible pour tous les services rendus par ces écosystèmes ?

Autrement dit, si nous sommes aujourd’hui nombreux à comprendre l’urgence liée au changement climatique, beaucoup moins identifient comme un enjeu majeur les deux crises parallèles que sont l’épuisement des ressources et la chute de la biodiversité – alors que cet ouvrage indique qu’elles justifient à elles seules un changement de trajectoire.

Voilà pourquoi les promesses de salut par la seule technologie sont un leurre dangereux, une idée aussi vaine que celle de remplacer sur une place publique des arbres de haute tige par des ombrières métalliques. Nos modes de vie doivent changer, et bonne nouvelle : nous avons aussi à y gagner dans notre vie quotidienne.

Et Vincennes dans tout cela ?

Que déduire à l’échelle locale de ces considérations à l’échelle mondiale ? La collectivité contribue à une trajectoire vertueuse au travers de ses actions propres, ses budgets, mais aussi par le pouvoir de la réglementation, qui impose un certain nombre de règles aux autres acteurs du territoire : le Plan Local d’Urbanisme ou PLU est à ce titre un document clé à l’échelle locale. Une révision était soumise à l’enquête publique le mois dernier, parée de mille vertus. Nous nous réjouissons en effet de l’introduction d’une règle favorisant la perméabilité des sols, mais elle reste timide par le seuil imposé. Pire, au détour du règlement sur les zones urbaines, le standard de parking est consacré à la taille SUV : alors que le document revendique l’ambition de renforcer la place de la  nature en ville, l’équipe en place considère manifestement qu’il s’agit surtout d’augmenter celle de la voiture. Pas tout à fait ce que Donella et Dennis Meadows appelaient de leurs vœux.

Flop /Top du mois : La question climatique a été la grande absente de la campagne présidentielle. L’écologie politique réalise cependant, sur Vincennes le meilleur score du Val de Marne ,un encouragement à continuer pour le groupe Vincennes Respire …

Top du mois : Un réparateur vélos ouvrira bientôt ses portes Place Bérault !